Le crématoire de La Chaux-de-Fonds, un monument insolite
Véritable Gesamtkunstwerk, le crématoire de La Chaux-de-Fonds peut être considéré comme un ensemble artistique hors du commun sur le plan national voire européen. Pourtant, dès le début des années soixante, inadapté en confort et en espace, ce lieu est menacé de démolition. Grâce au bon fonctionnement de ses fours et à la crise économique, il échappe à la destruction et est enfin reconnu officiellement d’importance nationale en 1988.
Alors que la crémation est à nouveau admise en Suisse dès la fin du XIXe siècle, l'édification du crématoire de La Chaux-de-Fonds débute en 1908. La décoration de la salle de cérémonies est entreprise entre 1909 et 1910 par les élèves de l'Ecole d'art qui suivent assidûment le Cours supérieur d'art et de décoration de Charles L'Eplattenier. A cette occasion, le maître offre à ses élèves une opportunité d'appliquer leur savoir-faire dans une situation concrète. Ils s'adonnent ainsi à diverses techniques telles que la sculpture sur pierre, le vitrail, la mosaïque, la peinture décorative ou le laiton repoussé. En 1912, ces ornementations sont complétées par Charles L'Eplattenier d'un important ensemble de quatre peintures murales narratives baignées d’une aura symboliste enrichissant les réalisations décoratives de 1909–1910.
L'approche du crématoire est une véritable mise en scène. Cette théâtralité s'applique également à la salle de cérémonies, riche d'un décor qui se développe sur toutes les surfaces d'une pièce carrée d'environ dix mètres de côté et neuf de haut. Cette ambiance symboliste est renforcée lors des cérémonies par la présence irréelle de musique provenant des orgues cachées derrière l'évocation de la Purification et par la descente mystérieuse du catafalque.
Lors des Journées européennes du patrimoine en 2010, le crématoire de La Chaux-de-Fonds célèbre ses 100 ans; une occasion de découvrir ou redécouvrir ce lieu insolite, chef-d'œuvre Art nouveau et manifeste du Style sapin.
Image: Ville de La Chaux-de-Fonds, Service d'urbanisme, D. Karrer